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jeudi 16 février 2012

Le jeu des conservateurs
En s’en prenant seulement à la perversion électorale à Maurice, ceux qui entendent libérer la démocratie de ses entraves ont fait, en réalité, le jeu des conservateurs. Sans le retour à la perversion initiale, il est vain, sinon fallacieux, de prétendre corriger toutes celles qui en découlent. 
Les résultats de la démarche juridique entreprise par Rezistans ek Alternativ et Blok 104 étaient connues à l’avance : au gré de leurs convictions et de leur rigueur intellectuelle, les juges ne statuent qu’en droit ; il appartient aux législateurs d’édicter les lois qui traduisent leurs sens de la justice. Les juges ont fait, défait et bien fait ; jusqu’à s’en laver les mains !
Le fameux rapport Carcassone se résume à ceci : enlevez l’hydre raciste qu’est la Première Cédule de la vitrine constitutionnelle et emballez la monstruosité dans le cadre de vos arrangements de partis sectaires.  Ainsi, si l’on considère le bourbier dans lequel patauge aujourd’hui l’ensemble des partis conservateurs, en croyant se protéger derrière un âne, Ramgoolam aura récolté davantage que du vent…
Bérenger voudrait limiter le débat au cénacle des conservateurs. Quand on ne sait plus sur quel pied danser, il vaut mieux éviter les casse-pieds ! Quoi qu’il en soit, la réforme version Collendavelloo est laissée aux oubliettes – oui, celle qui devait apporter la légitimité féminine au maintien du communautarisme et qui, au final, assurait l’entrée des caciques des partis au parlement quand bien même que l’électorat leur en aura refusé l’accès. D’un côté, Bérenger fait appel maintenant au fantôme de Banwell et de l’autre il dépoussière la réforme version Sachs ; l’homme s’adonne à la valse-hésitation.
Des Rama à la rescousse, c’est Sithanen qui imprime maintenant la cadence ; mais, quoi qu’il eut pu faire, il n’aura accouché que d’un tango brouillon, deux pas en avant et autant en arrière. Le langage populaire procure une savoureuse traduction de la posture : « bouge fixe ». It takes two to tango et le peuple est devenu un partenaire rebelle…
Comment en est-on arrivé là ? Mine de rien et sans le vouloir, Blok 104 et Rezistans ek Alternativ ont procuré aux Conservateurs la partition où les mesures sont dorénavant calculés sur la seule thématique du Best Loser System (BLS). D’ailleurs, leur avocat, mon ami Rex Stephen, a eu l’honnêteté de reconnaitre dans une interview à Africa 24, qu’il ne s’agissait pas de changer le BLS, mais de questionner l’obligation de décliner une identité selon les critères établis comme contraintes préalables.  Or, ce n’est là qu’un symbole de l’escroquerie véritable perpétrée par la Perfide Albion, avec la complicité des responsables politiques locaux, et en particulier celui qu’elle jugea apte à assurer la succession de l’Administration Coloniale : Seewoosagur Ramgoolam. 
Pour rappel, le 12 mars 2011, j’ai choisi de braver seul les autorités de ce pays en abaissant le drapeau mauricien devant la statue de Seewoosagur Ramgoolam, érigé sur ce que j’ai baptisé la « Place de la Honte ». Oui, de ma part, tout ceci est réfléchi et calculé. C’est bien la légitimité de l’Etat mauricien que j’ai choisi de questionner. Et il est essentiel que la jeunesse de ce pays, et leurs ainés qui les rejoignent peu à peu au sein de la communauté des indignés, en fassent autant. Il est essentiel, à l’ensemble même de la population mauricienne, de réaliser qu’un Etat indépendant n’est souverain et légitime que dans la mesure où les conditions de sa constitution répondent aux critères qui autorisent son émancipation. Or, ces conditions ne s’y conformèrent pas en 1968. Elles ne s’y conforment toujours pas.

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