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lundi 20 février 2012

Inconséquences politiques: La réforme du… régime totalitaire !

ARTICLE PARU DANS LE MAURICIEN |  | PAR JOËL TOUSSAINT

Les responsables politiques du PTR, du MMM et du MSM se consultent au sujet d’une prétendue réforme électorale. Or, ce qu’il convient de réformer au plan électoral passe par une RÉFORME CONSTITUTIONNELLE que, même s’ils disposent ensemble de la MAJORITÉ ABSOLUE… ils se refusent à accomplir !
En ce moment, c’est le MMM qui assure le rôle de courroie de transmission entre le PTR et le MSM pour enclencher les discussions autour d’une prétendue réforme électorale. Qu’entendent-ils réformer au juste ? Les dirigeants de ces principales formations prétendent se soucier des conséquences d’une majorité écrasante qui, disent-ils, n’assureraient pas une juste représentation des minorités ethniques à Maurice. En dépit du fait que la population mauricienne n’est aujourd’hui qu’un assemblage historique de minorités qui se retrouvent, à la faveur des métissages génétiques et culturels, dans une même communauté de destin, les dirigeants des formations politiques traditionnelles voudraient néanmoins nous faire accroire qu’il existerait encore suffisamment d’éléments catégoriels pour établir la sous-représentation éventuelle d’une ou de plusieurs ethnies. Pour cela, – et c’est fondamental – il faudrait, en premier lieu que ces ethnies soient distinctes et également catégorisées ; de sorte que les éléments sociologiques servant à distinguer l’une d’elles servent également à catégoriser les autres. Je mets au défi l’ensemble des élus siégeant au Parlement d’y parvenir !
Serais-je téméraire ou inconscient ? Il n’en faut pas tant pour dénoncer cette vaste escroquerie intellectuelle. En effet, la Première Cédule de la Constitution n’établit même pas de catégorie ethnique au sens sociologique du terme ! Mieux encore : les critères de catégorisation constituent un ensemble tellement hétéroclite qu’ils forceraient même les meilleurs esprits de la Cour à abdiquer tant il leur est impossible de donner du sens là où les législateurs auraient promulgué du non-sens juridique. En clair, le caractère différencié des critères de catégorisation ethnique fait que la Première Cédule contrevient aux dispositions de l’article 16 de la Constitution qui protège les citoyens contre toute discrimination, mais cet appendice ne peut être considéré contraire à la Constitution… puisqu’il en fait partie !
En fait, les catégories usuelles des formations politiques traditionnelles sont issues des redécoupages opérés sur l’entretien de peurs identitaires et des faveurs accordées aux représentants emblématiques des groupes secondaires se retrouvant dans les catégories plus larges déterminées dans la Première Cédule de la Constitution. C’est ce qui est communément connu aujourd’hui sous le vocable « Communalisme scientifique ».
Aucune différence idéologique n’oppose les principales formations politiques siégeant au Parlement. Le Premier ministre l’a récemment démontré en évoquant les tractations qui ont habituellement cours lors des négociations d’alliances pré-électorales. Les deals entre ces entreprises électorales sont contractés sur la base des concessions (nombre de sièges et autres nominations de faveur) consenties de part et d’autre. Au-delà, il faut savoir que les trois formations politiques majeures sont tous trois membres de l’International Socialiste et que le PMSD qui se prévaut de la social-démocratie appartient donc au même courant de gauche. Le « Cartel des Gauches » auquel je faisais allusion dans un précédent billet publié dans la page Forum du Mauricien n’est pas qu’une vue de l’esprit. L’affiliation de ces formations politiques mauriciennes est un fait établi et, sous couvert d’élections législatives régulières, le système électoral a octroyé la légitimité requise à la succession de combinaisons d’alliances entre partis d’un même courant, fondant ainsi ce qu’on doit nommer un « régime TOTALITAIRE ».
Si la formule du « Cartel des Gauches » a bien fonctionné jusqu’ici, pourquoi diable leur faut-il réformer le système ? Même si les responsables politiques invoquent les conclusions du rapport d’Albie Sachs qui évoquent d’éventuels déséquilibres de représentation de minorités ethniques, aucun d’entre eux ne considère la nécessité de la réforme constitutionnelle. Cela n’est même pas à l’agenda de leurs consultations. Pourquoi ? La réponse se trouve dans l’approche Collendavelloo, notamment la nécessité de permettre aux partis de repêcher leurs leaders en cas de non-élection !
Le souci commun du « Cartel des Gauches » ne peut que favoriser sa capacité à élaborer la formule consensuelle garantissant ses intérêts communs. Quitte à ignorer, et voire même de pervertir, des considérations fondamentales. Les exemples sont multiples :-
•    Le maintien de la dérogation constitutionnelle de la Première Cédule comme structure de la proportionnelle souhaitée (car, même si les Law Lords pourraient donner raison à Rezistans ek Alternativ, ils ne seraient que les « koson » d’un jeu de dames (Grosjean comme devant) dans la mesure où les législateurs mauriciens sont souverains de leur Constitution).
•    L’insulte faite aux femmes, en leur garantissant un quota pour qu’elles participent à la pérennisation de la politique communale.
•    L’absence de considération pour une représentation plus juste des peuples des îles de la République qui, en fait, marque le maintien de la position néo-colonialiste de la métropole mauricienne, contraire aux dispositions onusiennes pour l’auto-détermination des peuples.
Ce ne sont là que quelques-unes des conséquences de la réforme électorale telle qu’envisagée par le « Cartel des Gauches » et qui n’est, somme toute, qu’une réforme de leur régime TOTALITAIRE. La dérive de ces partis aujourd’hui, c’est qu’ils entendent entériner un droit auto-octroyé pour imposer la présence au Parlement de leurs leaders qui ne seraient éventuellement pas plébiscités par l’électorat de leurs circonscriptions. Ainsi, quand bien même que le peuple voudrait éventuellement s’en débarrasser, leurs caciques voudraient pouvoir IMPOSER la longévité parlementaire de certains leaders entre autres responsables politiques issus du legs colonial !
Peut-on impunément tendre l’élastique qui retient les illusions d’un système démocratique ? La nature et l’actualité du moment nous apprennent ceci des macaques qui s’accrochent aux branches pour en accaparer seuls les feuilles : à force d’être provoqués, les éléphants mettent les arbres à bas…

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